Les critiques d'arts

Dr Clemens Jöckle - Historien d’art - Mannheim (2003)

Exposition après exposition il se dégage des œuvres de Minato une impression de logique.
Mais une logique particulière ! En effet la seule logique du peintre est celle du rêve. Il convient de saisir les images comme elles viennent. Et de se laisser transporter

Son réalisme est en effet moins celui d'une réalité observée et fidèlement reproduite que l'aspect énigmatique qu'elle revêt alors.

En effet le monde de MINATO est un monde irréel, virtuel, dans lequel sont plongées ses femmes ;
Femmes qui, nues semblent être habillées et vêtues semblent être nues. Car l’artiste a gelé leur mouvement, leur donnant, en quelque sorte l’aspect du marbre.

Ces êtres humains ont des traits si réalistes qu’ils finissent par ne plus faire preuve d’aucune individualité, seulement d’une attitude, d’une sorte de pose.
Les sentiments sont cachés comme par un masque

Leurs comportements semblent irréels. MINATO crée un monde sophistiqué, étincelant qu’il dévoile, en même temps, comme une existence vide de sens dans une ambiance luxueuse mais d’une froideur glaciale. Ses personnages agissent dans une solitude totale. A cet égard, le titre de certains tableaux, comme par exemple ‘Confrontation ’ désignent cette impossibilité de dialogue ; toutes ces femmes, en se tournant le dos, sont plongées dans leurs propres existences. Un sentiment inexorable d’isolement se dégage ! Tout ceci est souvent renforcé par l’opposition constituée par les vêtements en noir et blanc.

Mais elles ne luttent pas contre le vide. L’artiste crée une absence de paroles ; car, en effet, même si, par exemple, deux femmes occupent le même canapé, elles se tournent le dos, toute relation entre elles semble être interrompue. S’y ajoutent des objets, peut être, issus d’une iconographie funéraire, telle cette statuette cachée par un voile qui, en indiquant le monde fini, sépare les deux personnages. Cette symbolique de vanité est subrepticement introduite dans les tableaux.

Chaque toile semble être construite comme un plan de cinéma. Mais, souvent l’axe de la représentation est déformé. MINATO utilise une perpective très spécifique pour regarder la scène en contre plongée ou en plongée ou à partir d’un coin : une autre ‘Confrontation’ avec un homme nu dans un fauteuil et une femme vêtue vue de dos devant un miroir. Tel autre tableau emprunte à Velasquez sa ‘Vénus’. Mais contrairement à la tradition de la représentation de Vénus dans l’histoire de l’art, le miroir ne reflète pas le visage de la femme ; l’image disparaît au contraire, à travers un moniteur vidéo, dans un gris indifférent. Ce détail symbolisant lui aussi la limite entre le monde fini et l’infini, au même titre que cette fosse menant à l’obscurité d’une cage d’escalier qu’une femme, vêtue d’une robe de soirée, regarde d’en haut en y projetant son ombre.

Entrer dans le tableau c’est chavirer dans un autre monde.

Ainsi, MINATO renvoie aux figures anonymes d’un Edward HOPPER, aux accessoires empreints de nostalgie d’un Paul DELVAUX ou aux ambiances menaçantes et cauchemardesques d’un René MAGRITTE pour créer une tension dans la composition. Le geste maniéré, le poli parfait de la matière, le décor ornemental figé comme un revers formaliste de l’artificiel, sont ironisés chez MINATO et deviennent calcul de composition et vecteur de l’idée artistique.

MINATO nous présente un jeu de perles de verre, un musée de personnages de cire, plein de significations déroutantes, brillamment et délicatement exécutés, illustrant la perte d’identité comme image du temps.

DR CORNELIA VAGT – BECK - Historien d’art - Heidelberg (2004)

L’art contemporain se présente actuellement souvent à nous, comme un art ayant une tendance et un goût pour l’abstraction. Nous y rencontrons plus rarement le réalisme ou du moins de la matière sur laquelle l’œil du spectateur puisse fixer ses associations ou même se laisser conduire dans une direction thématique.

Nous sommes d’autant plus déconcerté et fasciné, lorsque nous rencontrons un de ces rares artistes qui, comme MINATO, ne se soumettent pas à cette tendance générale donnant une place de plus en plus importante à l’abstraction, mais au contraire se servent délibérément d’un style proche de celui des maîtres anciens des 17ème et 18ème siècles, pour transmettre leur témoignage artistique.

MINATO possède une grande maîtrise de la peinture à l’huile et se révèle être, en même temps, dans ses tableaux, un excellent connaisseur de l’histoire de l’art. Il joue délibérément avec ses décors et s’en sert pour ses propres mises en scènes. Le résultat est frappant, extraordinaire et fait preuve d’une grande originalité d’écriture. Bien que ses tableaux soient exécutés à la manière des grands maîtres des siècles passés, il témoignent d’une actualité résolument moderne et contemporaine, qui ne laisse aucun doute sur l’époque à laquelle ils appartiennent.

Les tableaux de MINATO nous font entrer dans un autre monde, nous paraissant à la fois familier mais aussi étrange car nous ne nous rendons pas compte de prime abord qu’il s’agit – sous des facettes diverses – d’un reflet du nôtre. En effet, malgré leur thèmes élégants et leurs décors séduisants ces tableaux sont critiques, même si cela n’apparaît pas immédiatement.

D’une manière minutieuse, quasiment « photo réaliste », l’artiste nous emmène dans un monde de luxe qui lui sert de théâtre pour sa dramaturgie. L’architecture grandiose de l’Egypte ancienne, du Baroque ou du Classicisme avec des escaliers monumentaux et ses colonnes ou bien encore ses intérieurs illusionnistes plus modernes constituent les décors des tableaux, qui ont cependant l’air presque stériles et aseptisés en raison de leur perfection et de l’absence de toute trace de vie humaine

Ses acteurs sont en général des femmes souvent seules, quelquefois par deux. L’homme ne tient alors qu’un rôle accessoire . Que les corps de ces femmes, immobilisées dans leur inaccessible beauté, soient vêtus ou dénudés, ils représentent une sorte d’idéal féminin . Dans leur perfection, ils ressemblent aux idoles de la féminité, libérés de leurs faiblesses et défauts.

Ainsi, nous contemplons un monde froid et cristallin dans lequel les femmes apparaissent comme idéalisées , sans individualité, comme pétrifiées. Chaque toile semble être construite comme un plan de cinéma ; Les scènes présentées sont peut être l'arrêt sur image de quelque film retraçant une mythologie moderne.

Aucun regard n’est échangé avec le spectateur. Les femmes mystérieuses de MINATO regardent avec lui dans la même direction, la plupart du temps dans le vide. Dans les vues frontales, leurs yeux sont bandés, ou bien une capuche cache leurs traits, rappelant les fêtes de carnaval baroque. Quelquefois l’artiste utilise une figure de style extrême en ne représentant qu’une partie coupée de visage tel un menton ou une bouche

D'abord s'impose à nous l'inquiétante idée que la réalité n'est pas ce qu'elle se plaît à paraître. Quelque chose d'étrange, de parfaitement inexplicable, est juste sur le point de se produire pour bouleverser un ordre établi chancelant, comme dans les tableaux « Le bassin de Neptune » ou « Terrasse » où le personnage féminin principal se retrouve de plus en plus en marge du tableau, représenté seulement par des hanches ou un bras ganté même s’il reste la figure centrale du tableau : L'irréparable est sur le point de survenir, les choses ne seront plus jamais semblables à nouveau...

Ombres profondes, distances trompeuses et présence impossible de femmes qui semblent à la fois victimes et auteurs des (mé)faits ; dans ses œuvres récentes MINATO accentue cet effet de suggestion du corps ne montrant par exemple que deux jambes féminines dans des escarpins…Le trouble engendré par ce tableau présumé incomplet est assuré ! Seul notre imaginaire peut satisfaire l'attente.

Les personnages de MINATO restent muets et nous continuons à rester de simples spectateurs. Solitude, isolement et incapacité à dialoguer ou à communiquer, donnent toute l’atmosphère de ces tableaux magnifiques. Cette illusion du merveilleux est donc trompeuse …A cette énigme, aucune réponse définitive ! Subsiste l’ambiguïté d'une réalité qui peut n'être qu'un faux-semblant ! A travers ces superbes tableaux, MINATO nous montre la superficialité de notre société et critique sa froideur et son indifférence.